Étre et (re)devenir

Les amitiés pérennes ont cette capacité douce-amère de nous rappeler qui nous sommes réellement, et agissent comme un miroir simultanément franc et compatissant. 

Elles me font l’effet d’un plaid moelleux et réconfortant dont on peut s’envelopper sans se poser de questions, lorsqu’une brise un peu trop fraîche nous surprend soudainement.

Avec Liz, notre temps limité est d’autant plus précieux : il y a peu de place aux banalités. L’urgence requiert d’entrer rapidement dans le vif du sujet. 

Se mêlent souvenirs embarrassés et hilarants, larmes et pensées émues pour les disparus, blessures d’enfance, passions communes, doutes paralysants, encouragements. Je lui dis mon admiration de ses écrits et de sa maternité exemplaire. Au détour d’une autre conversation, elle me dit que je peux être fière de ce que j’ai accompli. Les larmes me montent aux yeux. J’en doute.
Plus tard, je la remercie. Quelques années auparavant, c’est un autre ami américain qui m’avait félicitée. La même émotion, la même perplexité.
Ils me touchent et m’ébranlent à la hauteur de l’affection et du respect que je leur voue. 

Parfois pourtant, ce que l’on aime sincèrement nous provoque aussi beaucoup de frustration. Peut-être est-ce la fin de la trentaine approchant : les questions se posent, se répètent, insistent lourdement. Je navigue sur des eaux troublées, et si l’inconfort qu’elles provoquent causent bien des agacements, je suis convaincue que les chemins sinueux nous offrent une chance infinie d’écouter et de rebondir. 

Certains constats sont amers et retentissants. Ils m’enjoignent à retrouver mon essence, sans manquer de faire quelques détours pour y parvenir. Pour l’instant, je trouve refuge et réponse dans ce qui m’est fondamental :
Lire, écrire, aimer, me reposer, voyager, cuisiner. 

Je termine avec ce court passage qui a fait écho en moi récemment : « Une décision réelle nous rend humble, car nous savons qu’elle est à la merci de plus de choses qu’on ne saurait en énumérer. » James Baldwin, La chambre de Giovanni. 

Merci de me lire régulièrement depuis quelques années, merci aussi pour vos retours et vos silences. Par les mots et les maux, c’est une forme de mise à nue et d’intimité que l’on partage, tantôt en discrétion, tantôt en volubilité. 

Maud. 

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