Ma professeure Elena Brower, a écrit et lu un texte magnifique et émouvant lors de notre formation à Londres.
J’ai essayé de le traduire en étant, je l’espère, la plus fidèle à ses mots, et je souhaitais le partager avec vous.
Je pense que cela résonnera dans le coeur de beaucoup d’entre nous. Et si vous êtes partants, je serai ravie, et touchée, de recevoir par commentaires, email ou ce que vous choisirez, ce que signifie le yoga pour vous, ce qu’il vous a apporté et ce qu’il continue de nourrir aujourd’hui dans votre vie et dans votre quotidien. A l’heure où nous gérons tous des périodes de stress intenses, des difficultés à nous mouvoir, à dormir ou à respirer…Il est nécéssaire, voire essentiel, que l’on se rappelle que notre salut se trouve peut-être dans la simplicité : refaire le lien avec soi.
Etre à l’écoute de nos besoins.
Douce lecture.
« Le yoga en action est composé d’austérité, d’étude de soi et de l’abandon confiant à Ishvara, à Dieu, au divin. Si mon esprit et mon corps sont des passerelles vers l’expérience de ma beauté intérieure, de ma richesse et de ma lumière, comment ai-je pu passer autant de temps à anesthésier et à obstruer ma vision? Même maintenant, même pour un moment dans une journée, comment puis-je questionner la bénédiction qui se trouve sous mes yeux, juste devant moi? Même lorsqu’elle apparait déguisée comme une collision terrifiante d’énergies contraires.
Comment puis-je oser utiliser les cadeaux que j’ai reçus au nom de la destruction émotionnelle, physique et spirituelle? Cela fait partie de la pratique du yoga, que de poursuivre ces questionnements. Et ensuite de se connecter à la terre, de ralentir, de connaitre et d’amplifier mes dons plutôt que de sans cesse les mettre en doute. De marcher aux côtés de ceux qui choisissent de me pousser vers l’excellence et qui m’aident à cultiver liberté et contentement, chaque jour. De marcher avec ceux qui choisissent de se tenir auprès de moi lorsque les conditions semblent effrayantes. Leur présence me rappelle ce que nous avons tous à faire ici.
Grâce à ma capacité d’agir et de bouger, je peux choisir.
Soit de cultiver la confusion dans chacune de mes communications – avec moi-même et les autres – ou de générer l’excellence. Les forces prêtes à m’accompagner sont limpides : je pratique, je m’observe, je m’abandonne au divin à nouveau. Je pratique, je m’observe, je m’abandonne à nouveau.
Je pratique, je m’observe, je lâche prise. Chaque jour.
Pratiquer. Chaque jour une déconnexion, un rappel, une refonte. Un éclat de radiante intérieure, une respiration profonde qui connait le chemin et infuse mon esprit et mon corps. C’est pourquoi j’ai poussé la première fois la porte d’un studio de yoga, ma queue de danseuse classique entre les jambes, attendant de me faire hurler dessus pour un membre mal placé. Pour finalement y rencontrer l’amour, des sourires, des encouragements. La tolérance. Et depuis, cette pratique s’est prouvée à la fois mystérieuse et miraculeuse, m’amenant aux pieds des enseignants les plus raffinés et brillants de ce temps, recentrant ma vision pour que je puisse observer ce qui ne me semble pas aligné, parfois méconnaissable. La pratique m’a aidée à arrêter d’aimer ce qui n’est pas bon pour moi et à discerner ce qui l’est.
L’auto-observation m’a aidée à faire la différence entre plaisir et indulgence. L’étude des textes sacrés et de moi-même m’ont aidée à percevoir les moments où je m’éloigne de la simplicité ou complique les choses inutilement. Comme lorsque j’étais enfant et que j’avais l’impression que personne ne me voyait. Comme je le fais encore lorsque je me sens extrêmement fatiguée ou engluée dans un problème que je ne peux résoudre moi-même. Ce travail m’a aidée à me sentir repue dans la solitude, n’ayant besoin de rien d’autre. Alors je suis en mesure de re-calibrer mes penchants, d’affiner mes réponses, de demeurer dans la fluidité ou le calme du moment, avec tout ce qui me permet de m’auto-réguler.
Je peux changer le monde mais seulement à travers mon propre état interne.
Lâcher prise. C’est un autre sujet. Alors qu’il s’agit manifestement du commencement d’une pratique d’auto-observation, le lâcher prise est ce moment où l’on autorise la grâce à se diffuser dans nos espaces de sagesse intérieure et à tout adoucir.
L’abandon au divin anime la pratique et devient une action faite pour moi, par moi, avec moi, si je la laisse vivre en moi. Quand je lui donne l’espace pour se développer, cet abandon émane de la plus haute autorité et s’articule avec la plus élégante subtilité. Quand je ne suis plus animée par mes impulsions émotionnelles et me remémore l’intelligence demeurant à la Source, je m’abandonne dans tout ce qui doit rester au premier plan. Non pas un déséquilibre ou une opinion, mais une confiance profonde en l’évolution. Et une volonté d’y faire face avec aisance, en accueillant le prochain renouvellement.
« Cette réalisation nous rend plus sage. Il devient plus facile pour chacun de nous débarrasser des pensées et des sentiments douloureux. Sans perdre notre sensibilité face aux conditions qui sont à la fois réelles et importantes sur le plan matériel. S’abandonner au divin nous offre la possibilité d’opérer simultanément sur les deux niveaux – spirituel et ordinaire – Nous sommes totalement conscients de notre réalité intérieure et respectueux des forces qui dominent notre existence dans le monde. Nous devenons citoyens des deux mondes et avons la sagesse d’honorer et d’obéir aux lois de chacun. Nous sommes à même d’accomplir nos actions habilement, avec sagesse et amour, et aucune d’elles n’est plus contraignante. » Pandit Rajmani Tigunait
Pratique. Etude. Lâcher prise. Soyez à l’écoute de ce qui vous touche. Mais fondamentalement, vous êtes ici pour vous apprendre à répondre consciencieusement aux difficultés rencontrées lorsque vous êtes englués dans vos schémas, vos croyances, vos suppositions. Le processus dynamique de se défaire de toute forme d’incompréhension est le cadeau de cette forme humaine, la bénédiction offerte à l’esprit humain.
C’est le travail de regarder à l’intérieur avec une bienveillance durable et grandissante. »
– Elena Brower –
Crédit photo : Brigitte Baudesson